Passer au contenu

Pourquoi la conversation est elle si facile ?

Garrod et Pickering ont écrit en 2004 un article intéressant sur pourquoi nous sommes génétiquement davantage programmés pour le dialogue que pour le monologue — Ceci peut sembler paradoxal: la conversation demande non seulement d’exprimer ses pensées comme pour le discours mais aussi et en même temps de décoder la parole de notre interlocuteur. —

lien sur l’article 2004GarrodWhy is conversation so easy_Trends in Cognitive Sciences

Résumé:
En effet, il est paradoxalement plus difficile de faire un discours que de suivre une conversation.
On peut converser avec quelqu’un de manière spontanée pendant des heures sans se fatiguer alors que si nous devons faire un discours sans support, l’inspiration peut se tarir assez vite, faute d’interaction.
A l’inverse, suivre une conversation pendant une heure est une activité très courante,facile et à la portée de tout cerveau.

Dans cet article Garrod et Pickeing nous explique comment la conversation est essentiellement un mode d’imitation inconsciente, une forme d’écho qui rend l’exercice facile pour notre cerveau qui est génétiquement cablé pour cela.

La lumière vient des neurones miroirs et la voie express entre perception et action
Tous les cerveaux d’organismes sont construits pour agir et percevoir, la perception permettant d’ajuster l’action. Les neurones responsables d’un geste sont situés au même endroit que les neurones responsables de la perception de ce geste, pour des raisons d’efficacité énergétique et de temps de réponse.
Si un neurone de mon cerveau actionne mon pied droit pour lancer un ballon, mon cerveau perçoit le geste en même temps avec un neurone miroir situé juste à coté du premier neurone responsable de l’action.

Dans la nature, l’observation des bancs de poissons en est une illustration, tous les poissons tournent à gauche en même temps car percevoir son voisin tourner est la même chose du point de vue neurologique que tourner, il n’y a pas de décalage.
Notre cerveau a évolué davantage que celui des poissons et aujourd’hui nous ne nous jetons pas sur une personne qui nous plait, un plat appétissant ou une bonne boisson. En effet nous avons rajouté des neurones qui inhibent l’action et qui font que nous nous comportons correctement. Mais l’évolution a créé de nouveaux neurones sans déplacer les neurones responsables de la perception et de l’action, ils sont restés voisins et agissent en miroir.

Ces neurones miroirs agissent dans la conversation lorsque celle ci est spontanée, et font que nous imitons spontanément notre interlocuteur en le percevant.
D’après Garrod et Pickering, cette perception et donc imitation intervient aux niveaux:
– phonologique (façon de prononcer)
– syntaxique (forme des phrases)
– lexical (mots utilisés)
– pragmatique (sens tiré du contexte intentionnel)

en s’appuyant sur la production de notre interlocuteur, nous l’imitons et l’enrichissons spontanément pour créer le fil de la conversation. Comme nos corps dans une danse à deux, notre cerveau se guide sur celui qu’il guide.

Les humains seraient donc davantage programmés pour le dialogue que pour les monologues.

Le point qui nous intéressera pour la gestion des conversations est que nous sommes davantage équipés pour réagir à la conversation (centrés sur l’autre) que pour imposer nos pensées (centrés sur nous).